Sabine Pirolt

Journaliste reporter
Reportage

Dix ans après

En 2005, pour comprendre les émeutes qui enflamment alors la France, «L’Hebdo» installait une antenne dans une banlieue du 93 durant trois mois. Dix ans après, à l’occasion de la sortie d’un film sur le Bondy Blog, nous sommes retournés voir comment la situation a évolué et ce que sont devenues les personnes que nous avions rencontrées.

SÉANCE  Les blogueurs  du Bondy Blog se réunissent une fois par semaine pour présenter leurs sujets. (Photo Corentin Fohlen)

«Dans la vie, il ne faut jamais baisser les bras.» Voilà la leçon que Dolly Buabua, 39 ans, retient de ses années de galère. L’Hebdo l’avait rencontrée en automne 2005 à Bondy, où la rédaction avait installé, trois mois durant, une petite antenne pour raconter la vie d’une banlieue en Seine-Saint-Denis pendant les émeutes françaises. La situation de Dolly était alors désespérée: sans papiers, elle était à la rue avec ses filles de 8, 9 et 13 ans. Après l’avoir chassée, son ancien logeur avait confisqué ses affaires. Elle n’avait même plus d’habits de rechange pour Stéphanie, Raissa et Célia. Et l’assistante sociale l’avait renvoyée: pas de papiers, pas de soutien. Trois journalistes de la rédaction lui avaient consacré plusieurs articles.
Dix ans après, à l’occasion de la diffusion du film* Bondy Blog, portrait de famille du réalisateur Julien Dubois, le 22 février, nous sommes retournés à Bondy pour voir comment la situation a évolué et savoir ce que sont devenues certaines des personnes interviewées en 2005. J’étais la deuxième de la rédaction à m’y établir, après Serge Michel, et j’y avais séjourné neuf jours. Une expérience bouleversante.

Cet automne-là, à la suite de la mort accidentelle de deux adolescents poursuivis par la police, c’est le soulèvement dans les banlieues françaises: 10 000 voitures sont brûlées, des bâtiments publics et commerciaux sont incendiés. Les journalistes de L’Hebdo se relaient, à Bondy, dans le petit studio du Racing Club Blanqui, une zone urbaine sensible (ZUS), au cœur de la cité du même nom, pour comprendre et donner la parole à ceux qui ne l’ont jamais (lire l’encadré en page suivante). Ils créent le Bondy Blog. Cette démarche a un retentissement médiatique mondial. Journaliste au Monde, Florence Aubenas, qui s’est intéressée de près au Bondy Blog, commente: «C’est le premier média qui a fait d’Internet un support sérieux. D’autre part, l’idée de traiter une émeute en France comme une émeute en Afghanistan, avec un regard d’anthropologue, en se relayant, comme sur un conflit, était formidable. Il y a un avant et un après Bondy.» Les quartiers, tremplins ou nasses
Pour Dolly aussi, il y a un avant et un après Bondy. La roue a tourné: elle a quitté le 93 pour s’installer à Lille, grâce à sa sœur qui lui a trouvé un appartement. Elle a désormais un titre de séjour, a suivi une formation d’auxiliaire de vie sociale et travaille, avec bonheur, auprès de personnes âgées. Ses trois filles se portent bien. L’aînée suit des études de management et les deux cadettes vont passer leur bac. Dolly a même créé une association pour les orphelins et les handicapés au Congo, son pays d’origine. Exceptionnel, le destin de Dolly? A vrai dire, personne ne sait.

Comme le confirme Renaud Epstein, docteur en sociologie et maître de conférences en sciences politiques de l’Université de Nantes, il y a un énorme problème en France. «Les indicateurs statistiques ne permettent pas de suivre la situation des gens qui ont quitté les zones urbaines sensibles. Quel est le pourcentage des gens pour lesquels les quartiers ont joué le rôle de tremplin ou de nasse? Quelle est la proportion de ceux qui ont trouvé un travail et ont quitté ces ZUS? Ce que l’on sait, en revanche, c’est qu’au niveau chômage, pauvreté et santé, tous les indicateurs (lire l’encadré chiffres) se dégradent. Mais cela ne veut pas dire que la population va plus mal car, en 2015, il ne s’agit pas des mêmes habitants qu’en 2005.» Peut-être. De fait, ceux qui sont restés et que L’Hebdo a retrouvés ne voient pas la vie en rose pour autant. Ex-maire de Bondy, élu sénateur socialiste en septembre 2011, Gilbert Roger, qui habite toujours Bondy et qui nous reçoit à la mairie ce jour-là, résume, la mine défaite: «Nous n’avons pas évolué. Ma vision est pire qu’en 2005. Toute la société française est en crise. Cette situation me désespère. Ici, nous sommes dans un des territoires les plus marqués par le chômage de masse, avec un taux de plus de 30%. Ceux qui s’en sortent partent du 93.»

Président du Bondy Blog, Nordine Nabili va plus loin encore. Il affirme qu’une partie des habitants des banlieues vit dans le tiers-monde. «Il y a une clochardisation assumée d’une partie de la population. Cela coûte moins cher de ne rien faire que de l’aider à se développer. C’est pire que l’apartheid évoqué par Manuel Valls en janvier. Car l’apartheid peut être aboli par une loi. Nous vivons dans un monde de férocité et de carnivores, où il n’y a pas de place pour les faibles et pour ceux qui veulent leur donner un coup de main.» Les deux hommes ne sont pas les seuls à dénoncer la situation. «C’est devenu plus violent. Les jeunes se montrent agressifs plus tôt. Et c’est toujours de la faute des autres s’ils n’ont rien. Ils vendent du shit à 15 ans et, ensuite, c’est le décrochage scolaire», explique Mohamed Djeroudi qui, en 2005, était animateur jeunesse à Bondy et président du RC Blanqui. Ce père de trois adultes est devenu grand-père et directeur du Centre social Louise Michel/Mikado à Tremblay, à vingt minutes de Bondy. Un poste d’observation privilégié. Voici dix ans, il avait beaucoup œuvré pour aider les journalistes de L’Hebdo, leur fournissant contacts et idées de sujets. Aujourd’hui, il se dit très déçu par la tournure qu’ont prise les choses. Il aurait aimé que le Bondy Blog reste dans le quartier de Blanqui et parle des gens qui y habitent. «Aujourd’hui, au Bondy Blog Café, on donne la parole à l’establishment. Même à l’inauguration du livre Bondy Blog: Des journalistes suisses dans le 9•3, en 2006, il n’y avait que le gratin. Il manquait les gens sur lesquels les journalistes avaient écrit.» Ce Bondynois reconnaît cependant que le partenariat avec l’Ecole de journalisme de Lille «est une bonne chose pour tous ces jeunes. C’est un bon laboratoire.»

Attablé au café Le Murat, à deux pas de la gare de Bondy, Kamel El Houari, 35 ans, écoute et approuve celui que tout le monde appelle Mimi. Lui, le beau gosse de la cité de Blanqui, qui a arrêté l’école vers 12 ou 13 ans pour fumer et ne rien faire, était présent pour nous en 2005. Ce grand gaillard au sang chaud, mélange de tendresse et de colère sourde, qui a fait plusieurs séjours en prison, était devenu blogueur au Bondy Blog, juste après le départ de nos rédacteurs. Il avait séjourné à Lausanne, avec cinq autres jeunes blogueurs, accompagné de Radouane Berrokia, alors entraîneur du RC Blanqui, et Mohamed Hamidi, rédacteur en chef devenu réalisateur, pour suivre une formation d’une semaine donnée par divers médias, dont L’Hebdo, la RTS et Le Monde.

Sarko l’a mis KO
Devant un café noisette, Kamel, devenu père d’une fillette de 5 ans, raconte comment il s’est brûlé les ailes aux côtés de Nicolas Sarkozy. C’était en décembre 2006. Avec d’autres blogueurs, il se rend à une journée organisée au Ministère de l’intérieur. Kamel ne tient pas en place, il sort et croise Rachida Dati. Elle lui demande de retourner s’asseoir dans la salle, car il manque de jeunes. Il lui demande un café et le numéro personnel de Sarkozy, qu’il finira par obtenir. Alors en campagne pour les élections présidentielles, Nicolas Sarkozy l’engage dans le service de communication de l’UMP. «Nous préparions les meetings, cherchions des salles, organisions le matériel, allions parler aux jeunes avant que Sarkozy arrive dans les quartiers populaires.»

Le candidat devenu président, tout s’arrête d’un jour à l’autre pour Kamel. Celui qui plaisante en disant qu’il a «une maîtrise de la rue» n’a pas les bons diplômes. «Je suis triste encore aujourd’hui. Ça fait très mal.» Ce qu’il a appris de sa mésaventure? «Il vaut mieux être de droite que de gauche pour les connexions. Si j’avais su, j’aurais fait plus de réseautage. Je n’ai pas su me revendre. D’autres ont trouvé un poste chez Renault ou BMW.»

Kamel vit aujourd’hui avec le RSA (revenu de solidarité active), soit quelque 400 euros par mois. «Ce n’est pas une vie, c’est de la survie!» Il s’occupe de sa fillette durant la semaine et c’est la mère de l’enfant, dont il vit séparé, qui prend le relais en fin de semaine. L’avenir? Il rêve de lancer un journal, dont il a déjà acquis le nom de domaine pour un euro. «Il s’appellera Zoom 93.» Il a également trouvé un parrain pour son magazine, Patrice Quarteron, plusieurs fois champion du monde de boxe thaïe. Tout le reste est encore à faire.

Le destin de Khadija et Fatiha
En attendant, Kamel, qui parle l’arabe marocain, accepte de jouer au «fixeur» pour la journaliste suisse qui s’est fait mal recevoir au téléphone par l’un des six enfants de Khadija, une lumineuse femme de chambre marocaine qui travaillait dix ans plus tôt à l’hôtel Eden de Bondy, et dont elle avait alors fait le portrait. Khadija se souvient de celle qui était venue prendre le thé aux 4000, la cité de la Courneuve que Nicolas Sarkozy voulait «nettoyer au karcher» après les émeutes. Elle propose d’inviter Fatiha, son ex-collègue qui était également là, en voisine et amie. Elle aussi avait fait l’objet d’un post sur le Bondy Blog. Le rendez-vous est pris pour le lendemain. Le temps est maussade ce dimanche après-midi sur la Courneuve. Généreux, Mimi a fait le taxi. Khadija n’habite plus dans un immense immeuble, mais au rez-de-chaussée d’un petit  bâtiment neuf qui abrite quatre familles. Dans certaines banlieues, les monstrueuses barres ont cédé leur place à un habitat à taille humaine. On a refait le décor, mais il n’y a toujours pas de travail. Cette «promotion», Khadija la doit à un de ses fils, atteint d’une tumeur qui lui a laissé une jambe raide. Les retrouvailles sont émouvantes. Oui, les deux femmes, qui désormais ne travaillent plus, se souviennent de la photo prise devant chez elles par un photographe de L’Hebdo. Un homme, chef autoproclamé du quartier, entouré de gars à la mine inquiétante, s’était montré très agressif, voulant savoir pourquoi ces étrangers avaient pris un cliché. Plus rapide que son ombre, Fatiha avait dégainé une excuse, omettant surtout de prononcer le mot journaliste. «Il ne faut plus avoir peur, cet homme est mort, abattu pour de sombres histoires.» Ouf, plus de traces de gars qui guettent dans les halls d’entrée.
En 2005, la vie n’avait pas épargné Khadija, alors mère Courage de 44 ans, mariée de force au Maroc, à 13 ans, à un «vieux qui boitait». Divorcée trois fois, elle avait eu un enfant d’un lit précédent et cinq autres de son époux actuel. L’un de ses trois garçons, Sliman, était mort en septembre 1997 dans un accident de RER. Il avait 15 ans. «Aujourd’hui encore, chaque fois que je pose à manger sur la table, je pense à lui.»

Deux mères, un même chagrin
Terrible ironie du destin, Fatiha, 52 ans et mère de cinq enfants, a  perdu elle aussi un fils, un peu moins de dix ans après son amie. Il est mort à 17 ans, dans un accident de moto. Aujourd’hui encore, elle avale une quantité impressionnante de médicaments. Son chagrin est immense et ravage son visage lorsqu’elle parle de son Kamel. «Mon petit repoussait mon mari quand il avait bu et qu’il me menaçait. J’accepte la mort, mais la douleur ne passe pas. Je survis.» Khadija écoute son amie. Elle dont le mari joue sa rente au PMU tous les mois, elle qui a installé son fils dans son cercueil s’adresse à son amie: «Tu as d’autres enfants, Fatiha!» Et d’ajouter: «Je ne suis pas comme Fatiha. Elle ne fait pas la prière.» Parce que ça aide, la prière? «Bien sûr!»

Regard sur les attentats de janvier dernier
Assise à côté de sa mère, Nadia, jolie femme de 22 ans, écoute celle qu’elle appelle sa «tante». «Avec la religion, on accepte mieux ce qui nous arrive. Moi, je suis dans la religion. Il n’y a pas longtemps, j’étais voilée de la tête aux pieds. J’ai cessé de m’habiller ainsi voici une année.» Que pense-t-elle des événements du 7 janvier? «Je suis contre les caricatures du Prophète, mais je suis également contre le fait de tuer. Ces personnes ont sali notre religion, elles n’ont rien fait de bien. Maintenant, les gens pensent que tous les musulmans sont des terroristes.» Nadia a-t-elle raison ou tort? Une chose est sûre, comme l’explique Renaud Epstein: «Dans le débat public, la relation a été faite entre 2005, soit l’embrasement des banlieues, et les événements de janvier 2015. Les regards se sont tournés vers les quartiers alors que les frères Kouachi ont passé leur enfance en Corrèze. Lorsque l’on parle des quartiers, on fait une métonymie, c’est une manière de cibler un groupe de population que l’on n’arrive pas à nommer. A défaut de viser ces minorités, on vise les quartiers où elles sont concentrées. En France, on ne voit que le tabou de l’ethnicité, mais on n’en parle surtout pas.» La situation se dégrade néanmoins dans les banlieues. On assiste à la radicalisation de jeunes et il existe des zones de non-droit où le service éducatif et la police ne rentrent pas. Mohamed Djeroudi: «On nous laisse entre nous. J’ai entendu un homme au marché, l’autre jour, qui parlait de mécréants et de la Palestine. C’est interdit, mais on laisse faire. Il y a toujours eu des radicaux dans les religions.» Mais, aujourd’hui, comme il le souligne, Internet joue le rôle d’accélérateur. «Nombre de parents laissent leurs enfants seuls devant l’écran. Ils ont bonne conscience parce qu’il faut l’accord parental pour aller sur le porno. Mais il n’y a pas que cela sur Internet…»

Abdhallah, un Bondynois qui s’occupe de réinsérer les chômeurs dans le monde du travail, s’inquiète aussi de la tournure des événements et des remarques de certains jeunes qui se radicalisent. «Même notre mode de vie est remis en cause: plus question de boire ou de fumer à leurs yeux. Ils nous disent: «Tu sais, tu devrais aller à la mosquée le vendredi!» Et un gamin qui ne fait pas ramadan, on lui jette presque des pierres. C’est ça, la réalité.» Il constate ce changement depuis dix ans. Et cela fait presque autant d’années qu’il dit tenter de faire passer le message aux autorités. «Il y a un poids de la religion qui dépasse le domaine personnel et de l’individu. Personne ne vient dire à ces jeunes que c’est dangereux. Les profs font ce qu’ils peuvent. Prof, c’est le métier le plus difficile qui existe dans certains quartiers.»

Des jeunes perdus

Plus ancien blogueur, journaliste qui travaille pour TF1, Le Monde et M6, Idir Hocini analyse d’un oeil averti les questions qui touchent aux banlieues et à la religion. A 35 ans, ce Bondynois est pigiste, malgré son master en histoire et son diplôme de journaliste. Actuellement, il coécrit le scénario d’une série télévisée. «En France, une personne qui porte un prénom français doit envoyer en moyenne 17 CV pour avoir une réponse. Si elle a un prénom maghrébin, elle doit en expédier 100, à en croire certaines études. Les riches et les pauvres n’ont pas la même éducation. Quand l’université est devenue populaire, les enfants des classes supérieures ont privilégié les grandes écoles. Maintenant que les jeunes des banlieues arrivent à Sciences-po, ils vont étudier dans des écoles réputées à l’étranger. Ils ont toujours un métro d’avance.»
Et quel regard porte-t-il sur les événements de 2005 et de 2015? «En 2005, il s’agissait d’un ras-le-bol, d’un manque de perspectives. En 2015, ceux qui partent pour l’Etat islamique semblent avoir été manipulés, comme dans une secte. Ce sont des jeunes qui sont perdus et pour lesquels la religion est un réconfort.» La foi peut donner un sentiment exaltant, explique encore Idir. «C’est le feu sacré des premiers convertis. Une personne est transcendée lorsqu’elle est convertie. C’est un sentiment fort. Sur les forums, on leur dit: «Tu es un élu, pas un nul.» Et là, ils sont embarqués.» Même à Bondy, il connaît un jeune homme dont le voisin est parti en Syrie. «A la limite, le monde terrestre ne les intéresse plus.»
Voici quelques jours, le premier bébé du Bondy Blog est né, fils d’Idir et de Kahina, deux blogueurs. «C’est vrai que l’on peut être heureux en banlieue. La preuve, mon fils Adam est né à Bondy. Il y a une bonne ambiance, on rigole beaucoup, Mais, après, il faut bouffer…»

 

«Les riches et les pauvres n’ont pas la même éducation. Les enfants des classes supérieures ont toujours un métro d’avance.»
IDIR HOCINI Journaliste et blogueur

 

2005-2015

UN BLOG DEVENU GRAND
«Chapeau à «L’Hebdo!» Ce lundi soir 9 février, Myriam El Khomri, secrétaire d’Etat auprès du ministre de la ville, accorde quelques minutes d’interview à L’Hebdo, après l’émission qu’elle vient de tourner à Bondy. Elle ajoute: «Je remercie encore les journalistes suisses pour ce qu’ils ont fait. L’histoire du Bondy Blog est très importante. Leurs confrères français devraient faire ce travail d’immersion aujourd’hui.» Deux heures durant, l’invitée du Bondy Blog Café a répondu aux questions de Nordine Nabili, président du Bondy Blog (BB), de trois jeunes blogueurs et d’une journaliste économique de France 2, ancienne du BB.

Depuis 2011, l’émission a lieu tous les mois, en public, au café Le Murat, à Bondy. De François Hollande à Dominique de Villepin, les blogueurs ont déjà accueilli des personnalités politiques de tout bord. L’émission est ensuite diffusée sur LCP et France Ô. Pas de doute, le BB a fait du chemin depuis sa création, en automne 2005. Les voitures brûlent alors dans le 93 et L’Hebdo cherche une idée pour couvrir ces événements. Chef d’édition, Jean-François Fournier propose une immersion en banlieue. Serge Michel, chef de la rubrique étrangère, suggère Bondy, où il connaît une famille. Avec l’accord d’Alain Jeannet, rédacteur en chef, il part y ouvrir une antenne de L’Hebdo et poste un premier article le 11 novembre. Trois mois durant, treize journalistes de la rédaction et deux stagiaires se succèdent dans le petit studio du RC Blanqui, club de foot de la cité, pour donner la parole à ceux qui ne l’ont jamais. Ils produisent 270 articles, qui suscitent 1300 commentaires. Les médias du monde entier parlent du BB.

Après trois mois, L’Hebdo laisse les clés à Mohamed Hamidi, alors enseignant. Depuis, ce Bondynois est devenu réalisateur d’un film avec Jamel Debbouze et a foulé le tapis rouge de Cannes en 2013. D’autres rédacteurs en chef lui succéderont, et le BB sera successivement hébergé par yahoo.fr, 20minutes.fr et aujourd’hui Libération. Il compte actuellement 30 blogueurs, encadrés par neuf personnes. Depuis 2009, le BB a créé un partenariat avec l’Ecole supérieure de journalisme de Lille. Des BB ont été ouverts notamment à Marseille, Lyon, Lausanne et en Tunisie.

 

 

 

Téléchargez le pdf Paru le 19/02/2015 dans l'Hebdo